don't torture yourself, that's my job.

Artémis claque la porte de chez elle et traverse l'entrée ainsi que le salon sans s'arrêter. Elle entend vaguement la télévision alors qu'elle passe d'un pas précipité en direction des escaliers, bien décidée à monter dans sa chambre sans passer par la case famille pour une fois. Aussi, elle croit entendre l'un de ses frères l'appeler, de même que sa soeur: mais elle ne répond pas. Les yeux brûlant à cause des larmes qui menacent de tomber, Artémis a peur de craquer si elle regarde un seul membre de sa famille. Si elle les entend lui demander si elle se sent bien. Alors elle monte les escaliers quatre à quatre, allant s'enfermer à double tours dans sa chambre avant de se laisser tomber sur son lit, assise. Le corps tremblant, elle pose ses coudes sur ses genoux et enfouit son visage entre ses mains. Une vague de nausée la secoue et elle serre les dents, se retenant de vomir de justesse. Elle a envie de tout casser. De se lever et de tout détruire: mais une petite partie d'elle se dit que ce n'est pas une bonne idée. Une petite partie d'elle a encore un minimum de bon sens. Pourtant, son avenir vient de s'écrouler devant ses yeux. Alors les larmes coulent, roulent le long de ses joues et viennent s'échouer sur son pantalon, ses épaules secouées par les sanglots silencieux qu'elle essaie de stopper en mordant le plus fort possible sa lèvre inférieure. Puis elle entend un son, celui de quelques coups discrets, pressés contre la porte close. Et la voix d'Helios qui l'appelle, qui lui demande si tout va bien. Sa seule réponse se fait d'une voix étranglée, alors qu'elle peine à respirer, en proie au désespoir et à la peur. Il entre et se précipite vers elle, tombant sur ses genoux, son visage s'approchant de celui d'Artémis. Ses mains se posent sur les joues trempées de sa petite soeur pendant qu'il cherche vainement du regard la moindre blessure, la moindre trace de ce qui pourrait la faire autant souffrir. Posant ses propres mains sur celles d'Hélios, Artémis secoue la tête, le goût amer de la bile au fond de la gorge. Elle se sent ridicule. Faible, et seule. Ridicule, parce qu'elle a ouvert son coeur à un type qui ne le méritait pas. Qui lui a promis monts et merveilles, comme certains savent si bien le faire. Pourtant marié, il lui a juré qu'il était séparé, parce que les choses n'allaient pas si bien dans son couple. Ridicule, parce que malgré les protections, Artémis a réussi à tomber enceinte et ne l'a appris il y a seulement quelques jours. Seule, parce que lorsqu'elle lui a annoncé, dans l'espoir qu'il puisse l'aider et lui dire quoi faire: le garder ou pas? Serait-il heureux d'apprendre qu'il allait être papa? Serait-ce le point de départ d'une nouvelle vie, pour tous les deux? Mais non. Il l'a simplement regardée et lui a dit de se débrouiller, que ce n'était pas son problème. Qu'il ne comptait pas quitter sa femme, que ça n'avait jamais fait partie de ses plans et que ce n'était pas de sa faute si elle avait été assez naïve pour croire toutes ces histoires. Donc en plus de tout ça, Artémis se sent aussi très conne. Et abusée. Parce qu'un avenir, elle en avait un: ses livres. Ses mots, couchés sur papier et diffusés. Mais maintenant? Qu'est-elle supposées faire?

Au milieu du torrent de ses larmes, elle sent une paire de bras l'entourer et une voix murmurer à son oreille que tout ira bien. Puis d'autres bras viennent s'ajouter. Et encore d'autres. Et d'autres voix viennent lui parler. La consoler et la réconforter. Alors Artémis pleure, encore de longues minutes. Des heures peut-être? En fait, elle ne voit pas le temps passer, pas plus qu'elle ne sent Morphée l'emporter dans ses bras, alors serrées contre ses frères et soeurs.